11. Un arbre de vie

Les deux décennies après la mort de Swedenborg

(1772 - 1790)

 
 
"L'arbre de l'histoire", ici de Adam au Christ.
Gravure du 16ème siècle.
 
 

    A cette époque il fallait beaucoup de courage pour se déclarer "swedenborgien". Il fallait aussi une grande indépendance d'esprit pour s'affranchir des deux systèmes de croyance dominants qu'étaient celui de l'Eglise catholique ou protestante d'une part, et celui du rationalisme scientiste d'autre part. D'un côté, il fallait pouvoir s'affranchir de la foi dans les dogmes de l'Eglise que les nouvelles doctrines contredisaient en de nombreux points, et de l'autre, à l'encontre de toute raison, admettre l'existence d'un monde spirituel, d'une vie après la mort, d'une âme et d'un corps spirituels, et celle encore d'un Divin, qui plus est, pleinement "Homme" !

   Déclarer publiquement sa foi dans les enseignements de Swedenborg, c'était, à coup sûr, être l'objet de méfiance, de sarcasmes et de mise à l'écart de la part de son entourage social, bien souvent aussi de la part de ses amis ou des membres de sa propre famille. Cela pouvait avoir des répercussions sociales et professionnelles considérables et parfois même aller jusqu'à entraîner des persécutions. Dans tous les cas, c'était encourir l'anathème des deux "Eglises", des deux systèmes de croyance qui dominaient alors le siècle, celui de la foi et de la soumission aveugle aux dogmes, et celui du temple sacro-saint de la raison pure et de la seule science.

    Soulignons que tous ces gens auront en commun une recherche de sens, riche et sincère, une vie spirituelle profonde et engagée. Beaucoup sont des membres de la noblesse, des personnalités politiques, des savants, des médecins, des enseignants, des membres de clergés divers. L’histoire qui en ressort est belle et riche, et elle a engendré à travers le temps toute une généalogie de "pères" et "mères" dans les doctrines célestes de Swedenborg.

   Il ressort de l'étude des derniers chapitres de sa vie, que le mouvement swedenborgien est, à l'évidence, initialement né de Swedenborg lui-même, et de son indéfectible volonté à publier et faire connaître ses enseignements le plus largement possible à travers le monde. Ses premiers disciples accompliront une oeuvre considérable de préservation, de traduction, de publication et de diffusion de ses écrits.

    Le mouvement swedenborgien est donc initialement parti de Swedenborg lui-même et de ses premiers cercles de disciples, ceux de Göteborg, de Londres mais aussi de Stockholm, d'Amsterdam, de Berlin et de Paris. Il est fascinant de voir comment le mouvement va, à partir de là, évoluer dans les différents pays d'Europe. L'histoire est riche de personnages de légende, hauts en couleur.

   Les deux décennies qui suivront sa mort connaîtront une belle déferlante de traductions et de publications. Des cercles et des sociétés très divers vont se constituer dans toutes les grandes capitales d'Europe, pour essaimer ensuite un peu partout dans le monde.

   Nous avons déjà évoqué la toute première génération de disciples, en Suède et en Angleterre. Ils seront les premiers à entreprendre, du vivant de Swedenborg, et souvent sous son impulsion, les premières traductions. Ils seront aussi les protagonistes des tout premiers ouvrages de littérature collatérale. Une littérature promise à un avenir fécond, puisqu'elle pourrait remplir aujourd'hui une bibliothèque de plusieurs milliers d'ouvrages, de revues et de documents divers !

En Suède

    En Suède le Docteur Rosen décédera quatre années seulement après sa condamnation par le Consistoire, et le Docteur Beyer une dizaine d'années plus tard. Ce dernier mettra 13 ans à réaliser un volumineux "Index initial de l'oeuvre théologique de Swedenborg", Amsterdam, 1779, ouvrage qui sera largement diffusé après sa mort. Beyer avait compris l'importance de lire et d'étudier la pensée de Swedenborg à partir de l'ensemble de son oeuvre théologique, et de très nombreux index portant sur l'ensemble de son oeuvre seront publiés par la suite.

   Dans les années 1770, le Dr. Beyer rencontre les frères Auguste et Charles Nordenskiöld qui deviendront parmi les plus ardents propagateurs des écrits de Swedenborg en Suède et à l'étranger. Seize ans plus tard, en 1786, Charles Nordenskjöld fonde la première organisation officielle en Suède, dédiée à la promotion des écrits de Swedenborg. Il s'agit de "La société exégétique et philantropique ", qui comptera jusqu'à plus de 200 membres. Leur revue : "Collections pour philantropes", Stockholm, 1787, publiera pour la première fois un grand nombre de lettres de Swedenborg. Soulignons que les frères Nordenskjöld joueront un rôle majeur dans la préservation des très nombreux documents et ouvrages non publiés de Swedenborg. Livres et documents qui auraient été, sans leur intervention providentielle, très certainement détruits ou perdus. Ils seront aussi les premiers à entreprendre de faire traduire les oeuvres de Swedenborg en suédois et en français.

   Aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est autour du diocèse de Skara, qui avait été pendant plus de trente ans le diocèse du père de Swedenborg, Jesper, que se constitue un autre groupe qui deviendra un foyer de rayonnement important. Les persécutions se poursuivront en Suède. Evoquons à ce sujet le Rev. Sven Schmidt, qui sera démis de son ministère, déclaré en état d'aliénation et interné à cause de ses prédications swedenborgiennes. Le Consistoire sera finalement parvenu à faire, avec ce nouveau bouc-émissaire, ce qu'il n'avait pas réussi avec le vieux savant !

En Angleterre

   A Londres, comme à Göteborg, quelques membres du clergé dont John Wesley, fondateur de l'Eglise méthodiste, et Aaron Mathésius, assistant pasteur de l'église de Suède que fréquentait Swedenborg à Londres, chercheront à le faire passer pour un fou, afin de détourner le plus de personnes possible de ses écrits.

   Comme à Göteborg,  il s'agit aussi de relations qui semblent avoir initialement sympathisé avec ses thèses, avant de les rejeter avec véhémence, pour se faire, par intérêt personnel, les apôtres d'un "procès d'inquisition", au nom de la "vérité" et de la sauvegarde de leur Eglise. Les moyens utilisés, toujours douteux et peu scrupuleux, sont à chaque fois les mêmes : le mensonge, la calomnie et les faux témoignages. L'ironie du sort voudra que Mathésius sombre, quelques années plus tard, dans la démence, et que l'Eglise swedenborgienne naissante, fasse perdre à Wesley six brillants pasteurs, dont deux figureront parmi les tout premiers fondateurs de l'Eglise "swedenborgienne" à Londres.

    En Angleterre le mouvement se cristallise donc très tôt autour de la question d'une organisation ecclésiale indépendante. Deux tendances s'opposent, non séparatiste et séparatiste. La première faction tentera, avec un certain succès, d'intégrer la nouvelle théologie à celle de l'Eglise anglicane, tandis que la seconde voudra à tout prix se séparer des Eglises officielles, pour fonder une nouvelle Eglise indépendante.

    Un premier groupe se constitue autour du Rev. John Clowes, recteur pendant plus de 62 ans de l'Eglise anglicane à Manchester. Il traduira de nombreux livres de Swedenborg en anglais. En 1782 il fonde, la "Manchester printing society", dédiée à l'impression, la publication et la diffusion des oeuvres de Swedenborg. Il traduira la plus grande partie de ces ouvrages en anglais et publiera de nombreux textes collatéraux tout au long de sa vie, dont un commentaire complet des Psaumes : "Les Psaumes : une nouvelle traduction de l'hébreu avec son sens interne, extrait des écrits d'E. Swedenborg", Manchester 1837, publié six ans après sa mort et plus tard suivi par son équivalent, cette fois dédié aux quatre Evangiles. Ces ouvrages serviront de modèle à la réalisation d'une sorte de "bible swedenborgienne" présentant l'intégralité des textes bibliques, accompagnés en parallèle de leur sens spirituel. Elle en trouvera plusieurs versions, jusqu'à la récente et volumineuse : "Bible Study Notes", d'Anita Dole, en 6 volumes, Boston, 1976-1979.

   Le Dr. Bénédict Chastanier, un chirurgien français vivant à Londres, fervent apôtre des doctrines de Swedenborg, est l'un des premiers à créer chez lui un groupe de lecture et d'étude. En décembre 1783, suivant l'exemple de Chastanier, un certain Robert Hindmarsh, imprimeur, rassemble grâce à une annonce publique tous ceux qui à Londres souhaiteraient étudier les écrits de Swedenborg. La même année, lui et ses amis constituent : "La Société pour la promotion des doctrines célestes de la Nouvelle Jérusalem". Cette association a pour but de répandre les écrits et les enseignements de Swedenborg. Hindmarsh publiera lui aussi un grand nombre de livres de Swedenborg en anglais ainsi qu'un magazine : "La nouvelle revue de la connaissance". Il réalisera aussi le premier "Dictionnaire des correspondances", compilé par ses soins et édité en séries de 1790 à 1792. Suivant ici aussi son exemple de nombreux dictionnaires des correspondances verront le jour au fil du temps.

    En 1786, la société londonienne compte déjà une cinquantaine de membres. Une partie de ses membres espère, elle aussi, que les nouvelles doctrines seront graduellement intégrées à l'Eglise officielle anglicane, d'autres au contraire aspirent à établir un culte indépendant. Sous l'impulsion de Chastanier qui publie, en 1787, le "Journal Novi-Jérusalémite", militant fortement pour l'institution d'une Eglise indépendante, un groupe au sein de la Société londonienne institue, le 31 juillet 1787, un culte indépendant. Le père de Robert Hindmarsh, le Rev. James Hindmarsh, alors pasteur méthodiste, est désigné pour assumer le premier la fonction sacerdotale. L'année suivante un lieu de culte "swedenborgien" indépendant est inauguré à Londres.

 
   

Numéro 3

Oeuvres d'Emmanuel Swédenborg.

Dominus Ipse Providebit.

Journal
Novi-Jérusalémite.

De l'Imprimerie du
Bureau Typographique
de la Nouvelle Eglise,
Erigé à Londres sous les
Auspices du Seigneur et
à l'aide des Amateurs
de la Vérité, par B. C.
en 1787.

 
  Couverture de la revue de Chastagnier "Journal Novi-Jérusalémite."  

 

 
 

En Allemagne

   En Allemagne, la polémique se développe à coups d'articles et de publications diverses dans le monde universitaire. Pour Swedenborg, c'est d'Allemagne qu'étaient venues les premières attaques, mais aussi les premières reconnaissances notoires de la part d'éminentes personnalités.

    La première offensive était venue d'un célèbre savant, le Dr. Johann August Ernesti, professeur de théologie à l'université de Leipzig, qui peu après la publication des "Arcanes Célestes", avait publié une critique incendiaire à son égard. C'est alors qu'un prélat de renom, Friedrich Christoph Œtinger, publie un ouvrage intitulé : "Philosophie terrestre et céleste de Swedenborg et d'autres", Tübingen, 1765. Sous l'influence d'Ernesti, le Consistoire du Würtemberg lui intente un procès, sa publication est aussitôt interdite et confisquée et il doit se rétracter publiquement.

    Il y eut aussi le vif intérêt que les récits de l'incendie de Stockholm et d'autres suscitèrent chez le célèbre philosophe Emmanuel Kant. Il avait envoyé un de ses plus fidèles amis et étudiants pour enquêter sur ceux-ci, et adresser un certain nombre de questions à Swedenborg. Afin de se départir de la chronique populaire qui commençait à voir en lui un spécialiste attitré des miracles de Swedenborg, et plus encore par crainte de voir sa réputation compromise après le récent procès, Kant publie l'année suivante un pamphlet anonyme intitulé : "Les rêves d'un visionnaire spirite", Königsberg, 1766. Sa réputation de philosophe critique en fut certes sauvegardée, mais cette publication pour le moins malhonnête, compte tenu des nombreuses informations dont disposait Kant, contribua grandement à fermer les portes du monde universitaire à la pensée de Swedenborg. Il regretta a posteriori cette publication, mais bien trop tard, car le mal était fait. Soulignons, par ailleurs, les très nombreux emprunts que fit Kant à la pensée de Swedenborg, et en particulier à sa cosmologie dont il lui doit l'entière paternité.

    L'année suivante, le beau-fils d'Oetinger, Heinrich Wilhelm Clemm, professeur de théologie à l'université de Tübingen, enfreint courageusement l'anathème avec une nouvelle publication intitulée : "Introduction complète à la théologie et au tout de la religion", Tübingen, 1767, dans laquelle il discute de la question swedenborgienne. Il y adjoint le texte d'une correspondance qu'Œtinger avait eue avec Swedenborg. Le procès et la courageuse défense d'Œtinger, les persécutions à son encontre, ainsi que la publication de Clemm, qui connut un certain succès, provoquèrent en Allemagne un intérêt grandissant pour le personnage et ses écrits.

    C'est finalement autour du Landgrave de Hesse-Darmstadt, Ludwig IX, converti par les "Arcanes Célestes", que se formera un premier cercle de fidèles, très concernés par la question de la vie après la mort et de la communication avec les esprits et les anges.

   Il faut mentionner aussi, pour l'Allemagne, l'écrivain mystique Heinrich Jung-Stilling et pour la Suisse alémanique, le prédicateur et poète Johann Caspar Lavater, qui influenceront à leur tour de célèbres auteurs comme Schelling, Hegel et Goethe.

En Hollande

    En Hollande, un auteur anonyme publie, dans la foulée du livre de Clemm dont il intègre des éléments : "Une collection de divers récits au sujet de Mr. Emmanuel Swedenborg et de ses communications avec le monde spirituel", Hambourg, 1770. En Hollande, alors pays de la libre expression, où Swedenborg avait publié la plus grande partie de son oeuvre théologique, et où tant de personnes étaient venues à sa rencontre et l'avaient accueilli, il n'y aura d'initiatives notoires que bien plus tard.

En France

    Pour ce qui est de la France, soulignons que ce seront les frères Nordenskjöld de Stockholm qui feront les premiers traduire les ouvrages de Swedenborg en français. Charles Frederick, alors ministre des affaires étrangères en Suède, s'associera dans ce but avec le marquis de Thomé en France, l'abbé bénédictin Antoine Joseph Pernety à Berlin et Bénédict Chastanier à Londres, tous trois français et adeptes de ses écrits. En effet, des traductions anglaises et allemandes de ses principaux ouvrages existaient déjà, il fallait donc se concentrer sur la publication de ses oeuvres en français qui était, en cette fin de 18ème siècle, la langue principale de toute l'élite intellectuelle européenne.

    Le nouveau roi de Suède, Gustave III, finançait déjà de son côté un autre traducteur, Jean-Pierre Moët, conservateur de la bibliothèque royale de Versailles. Moët, Chastanier, Parraud et Daillant Delatouche formeront un groupe de littérateurs engagés dans la traduction de ses écrits, plutôt critiques à l'égard des traductions de Pernety et de Brumore.

    Dix ans seulement après la mort de Swedenborg, Pernety publie la première traduction de son "Ciel et Enfer", Berlin, 1782. Il préface l'ouvrage avec un bel éloge biographique de Swedenborg. Cette traduction assez libre, très critiquée par Chastanier, tend certes à rendre le texte le plus conforme possible à l'orthodoxie catholique, mais il représente en même temps une première tentative de traduction moderne qui a son intérêt.

 
   
 
Portrait de Swedenborg en frontispice et page de titre de la première traduction française de "Ciel et Enfer",
par A. J. Pernety, Berlin, 1782.
 
 

    Chastanier traduira de son côté un grand nombre de livres de Swedenborg en français, se consacrant d'abord aux oeuvres inédites. Il réalisera ensuite une première oeuvre de compilation : "Tableau analytique et raisonné de la doctrine céleste de la Nouvelle Jérusalem. Précis des oeuvre théologiques de Swedenborg", Londres, 1786. Le livre se répand largement à Paris, Versailles, Rouen et Strasbourg.

    En 1788, le baron Charles Silfverhjelm, un neveu de Swedenborg, fait anonymement publier à Strasbourg une nouvelle compilation, probablement réalisée par Daillant de la Touche : "Abrégé des ouvrages d'Emmanuel Swedenborg". Cette oeuvre, traduite en plusieurs langues jouera un rôle important dans l'histoire de la diffusion de sa pensée en France, servant de "portail d'entrée" à de nombreux lecteurs, dont Balzac.

    Il faudra mentionner aussi, parmi ses premiers disciples en France, une figure un peu à part, celle du célèbre et charismatique pasteur Jean Frédéric Oberlin, du Ban de la Roche en Alsace, profondément attaché aux écrits de Swedenborg et avec lequel il avait correspondu. Il le fera connaître par son oeuvre et son rayonnement qui constitueront un témoignage de foi et de sagesse étonnant autant qu'exemplaire.

    Bien que n'étant ni le premier ni le dernier traducteur de Swedenborg,  Jean-François-Etienne Le Boys des Guays (1794-1864), sera indéniablement son principal traducteur en français, et le seul auteur à avoir à lui seul intégralement traduit toute l'oeuvre théologique de Swedenborg. Il réalisera la plus grande partie de ce travail durant sept années de labeur ininterrompu, de 1843 à 1850, pour en achever la publication complète en 1859. A cela s'ajouteront un grand nombre des principaux ouvrages posthumes de Swedenborg, ainsi que plusieurs ouvrages collatéraux de sa propre plume ou traduits d'autres auteurs. Toutes les traductions françaises modernes seront basées sur celles de Le Boys des Guays. Il sera lui-même un des principaux fondateurs du mouvement swedenborgien en France et en francophonie.

Pologne et Russie

    Il faut aussi évoquer la Pologne et la Russie où se constitueront, dès 1779, des groupes importants. La société de Moscou, composée de membres de la noblesse, était présidée par le Baron de Schrœde qui fera traduire l'oeuvre de Swedenborg en langue russe. Ses écrits seront largement accueillis dans les milieux savants et lettrés de ce pays. Schrœde financera aussi les premières traductions françaises de Chastanier.

Conclusion

    Vingt ans seulement après la mort de Swedenborg, la plus grande partie de ses écrits est traduite et publiée en anglais, en suédois, en allemand et en français, ainsi qu'en plusieurs autres langues. Il existe déjà une importante littérature collatérale, et les principaux outils d'étude (index, abrégé, concordance, dictionnaire, biographie, etc.) ont déjà trouvé leur toute première expression.

    Nous allons voir que tous ces précurseurs vont générer une très vaste arborescence d'amis et de disciples de sa pensée et de sa vision à travers le monde et le temps. Un arbre de vie et de lumière spirituelles, autant unique que singulier, à l'image de celui qui en aura été la semence initiale.



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